Sous le choc
2020-04-21
L’épidémie du Coronavirus a transformé le monde avec une vitesse et une violence sans précédent. Si la globalisation a été un concept abstrait pour beaucoup, il a trouvé ici une représentation brutale d’un évènement qui touche tous les pays dans tous les continents en même temps, même si les dégâts ne sont pas les mêmes pour tout le monde.
En Suisse, face à la crise, nous retrouvons - un peu contre toute attente - avec un gouvernement qui a saisi sa capacité d’agir vite et d’une manière volontariste, tout en faisant soin d’intégrer la population dans le processus. Les tensions au sein du Conseil Fédéral doivent être fortes, vu les enjeux et les pressions des milieux économiques, mais on peut confirmer pour une fois que le gouvernement fonctionne.
Mais la démocratie ne se résume pas au gouvernement. Il y a toute légitimité des parlements et des partis politiques de revendiquer leur place dans le processus de décision, soit pour confirmer les choix du Conseil Fédéral, soit pour négocier les moyens immenses qui sont mis en place, soit pour réparer les zones d’ombre laissées par des décisions prise dans l’urgence.
Cependant, c’est dans les recettes politiques que le bat blesse. Les socialistes et les radicaux courent vers la croissance, soit en distribuant de l’argent à tout le monde, soit en baissant encore une fois les impôts. L’UDC a identifié une nouvelle minorité à discriminer - les vieux. Et les Vert-e-s essaient d’établir un lien entre le virus et le climat. Il semble qu’en crise on ne change pas vraiment. On répète ce que l’on a toujours dit. Ce n’est pas complètement faux et chacune des réponses a une part de vérité.
N’empêche qu’aucun parti n’a prévu cette situation inédite. Donc la première chose à faire c’est de reconnaître que l’on ne sait pas. On ne sait pas combien de temps la situation exceptionnelle va durer. On ne sait pas combien de douleur et chagrin elle va encore produire. On ne sait pas combien de personnes vont se retrouver au chômage, endettées. On ne sait pas combien de temps arriveront à tenir celles et ceux qui s'engagent maintenant jour et nuit dans les hôpitaux et les services dites essentielles, face à la fatigue et l'essoufflement.
Les partis doivent répondre à un problème plus profond, celui la perte de confiance. La perte de confiance dans le futur d’abord. On a toujours vécu dans l’espoir que le monde de demain sera mieux que celui d’hier. Mais la perte de confiance vers l’autre aussi. Les humains sont des êtres sociaux et l’idée que l’autre en face soit porteur du virus d’abord, concurrent sur les ressources ensuite, est insupportable pour une société ouverte.
La Suisse, tout en tenant compte des contraintes de son intégration dans l’économie mondiale, se trouve dans une situation privilégiée. Nous ne sommes pas dans une crise économique structurelle de surproduction. C’est plutôt un tremblement de terre. L’interruption de l’activité, si énorme elle paraît en chiffres absolus, ne menace pas en soi la capacité économique de la Suisse. Le pays a suffisamment de réserves pour en faire face. Mais c’est la manière avec laquelle elle intègre tout-e-s ses habitant-e-s et qu’elle prend soin de ne laisser personne à côté, qu’elle peut réinstaller la confiance.